Sclérose tubéreuse de Bourneville
IRM
Hyposignal sur l'ensemble des séquences témoignant d'une zone d'ostéocondensantion concernant principalement les pédicules et les arcs postérieurs des vertèbres dorsales et de la partie visible des vertèbres lombaires
Scanner
Multiples ostéocondensations vertébrales atteignant les pédicules et les arcs postérieurs, majoritairement arrondies, de densité homogène à contours nets sans réaction inflammatoire péri-lésionnelle.
Aspect évoquant des nodules ostéo-scléreux dans le contexte connu de la sclérose tubéreuse (îlots de sclérose intra-osseuse).
Description
Description de la maladie
La sclérose tubéreuse de Bourneville, ou complexe de sclérose tubéreuse (TSC), est une maladie génétique autosomique dominante rare appartenant au groupe des phakomatoses (syndromes neuro-cutanés).
Elle est causée par des mutations des gènes TSC1 (codant l’hamartine) ou TSC2 (codant la tubérine) – des protéines régulatrices de la voie mTOR. Environ 70 à 80 % des cas résultent de mutations de novo sans antécédent familial.
Sur le plan pathologique, la maladie se caractérise par le développement de multiples hamartomes bénins dans quasiment tous les organes (peau, cerveau, reins, poumons, cœur, yeux, etc.).
Le tableau clinique est donc très variable selon les organes touchés et l’âge du patient.
Historiquement décrite par le neurologue Désiré-Magloire Bourneville en 1880, cette maladie portait le nom de maladie de Bourneville.
Incidence et épidémiologie
La sclérose tubéreuse de Bourneville est une maladie rare.
Son incidence à la naissance est estimée entre 1 sur 6 000 et 1 sur 10 000 naissances.
Les estimations de prévalence varient selon les populations et les méthodes d’identification des cas : on retrouve des chiffres autour de 1 sur 20 000 à 1 sur 50 000 personnes dans la population générale.
Les progrès diagnostiques récents (imagerie, génétique) suggèrent que de nombreux cas aux symptômes plus discrets sont mieux identifiés de nos jours, ce qui a fait réévaluer la fréquence de la maladie à la hausse.
Environ les deux tiers des patients atteints résultent d’une mutation spontanée, les autres étant issus d’une transmission familiale autosomique dominante. Il n’existe pas de prédominance franche de sexe ou d’ethnie connue pour le TSC.
Signes cliniques et manifestations associées
Le spectre clinique de la sclérose tubéreuse est très large, allant de formes peu symptomatiques à des atteintes multiviscérales sévères.
Classiquement, la triade de Vogt (décrite au début du XX<sup>e</sup> siècle) associe des crises d’épilepsie, un retard mental et des angiofibromes faciaux (anciennement appelés adénomes sébacés).
Cependant, cette triade complète n’est présente que chez ~30 % des patients.
Lésions radiologiques osseuses dans la sclérose tubéreuse
Bien que la sclérose tubéreuse soit surtout connue pour ses atteintes neurocutanées et viscérales, elle s’accompagne également de manifestations squelettiques radiologiques caractéristiques.
Celles-ci ne sont généralement pas apparentes cliniquement, mais leur détection en imagerie peut fournir des indices précieux pour le diagnostic. Les principaux changements osseux décrits dans la littérature sont :
- Foyers sclérosants osseux : Il s’agit de petites lésions ostéoscléreuses focalisées, apparaissant comme des zones d’hyperdensité localisées dans l’os (souvent au sein de la cavité médullaire). Ce sont les lésions osseuses les plus fréquentes dans le TSC, présentes chez environ 50 à 60 % des patients. On les retrouve typiquement dans le squelette axial notamment les os du crâne, les vertèbres (surtout segments postérieurs), les côtes et l’ilium au niveau des articulations sacro-iliaques.
Sur un scanner thoracique ou abdominal, ces lésions se manifestent par de multiples taches denses millimétriques dispersées dans les structures osseuses (voir figure ci-dessous). Elles sont considérées comme relativement spécifiques de la sclérose tubéreuse et constituent un signe radiologique d’orientation important.
Par exemple, la présence de ≥5 lésions sclérosées crâniennes à l’IRM/CT a une spécificité diagnostique proche de 100 % pour le TSC dans une étude comparative avec sujets témoins.
De même, ≥4 foyers sclérosants dans le thorax ou ≥5 dans le bassin permettent de discriminer quasi-systématiquement un patient TSC d’une personne indemne. Il est important de noter que ces zones de sclérose osseuse sont bénignes et asymptomatiques : elles ne nécessitent pas de traitement particulier et ne doivent pas être confondues avec des métastases osseuses ou d’autres pathologies malignes lors de l’interprétation des images. - Hyperostose de la table interne du crâne : Un épaississement localisé de la table interne du calvarium est parfois noté, notamment sur les scanners cérébraux. Cette hyperostose, c’est-à-dire une densification et un épaississement anormal de l’os compact interne, est un signe radiologique décrit dans le TSC. Elle peut passer inaperçue mais contribue au tableau osseux de la maladie.
- Formation osseuse périostée : Une apposition de nouvel os sous-périosté le long des os longs a été rapportée dans certains cas.
Cette réaction périostée se manifeste radiographiquement par une fine lamelle d’os néoformé parallèle à la diaphyse. Son mécanisme n’est pas bien compris, mais pourrait être une conséquence de la mutation TSC sur le tissu ostéogénique.
- Kystes osseux : Des lacunes kystiques intra-osseuses peuvent être retrouvées, en particulier dans les phalanges des mains et des pieds. Historiquement, la présence de kystes osseux multiples faisait partie des critères diagnostiques mineurs de la maladie.
Bien que non malins, ces kystes traduisent une dysplasie osseuse localisée. - Scoliose : Une proportion non négligeable de patients TSC développe une déformation scoliotique de la colonne vertébrale.
Dans le registre international TOSCA, ~23 % des manifestations « rares » rapportées incluaient une scoliose, suggérant qu’une minorité de patients (quelques pourcents) présentent ce signe.
La scoliose peut être liée à des malformations vertébrales congénitales subtiles ou à des déséquilibres musculaires, et nécessite une prise en charge orthopédique classique si elle est significative.
Conclusion
En pratique, la reconnaissance de ces lésions osseuses radiologiques est importante.
Bien qu’elles ne figurent pas toutes dans les critères diagnostiques principaux du TSC, leur présence (notamment les foyers sclérotiques multiples) peut orienter vers le diagnostic chez un patient autrement paucisymptomatique.
Inversement, chez un patient au diagnostic de TSC déjà connu, trouver ces anomalies osseuses ne doit pas susciter d’inquiétude démesurée : il s’agit de stigmates bénins de la maladie, n’altérant pas le pronostic et ne justifiant pas d’intervention spécifiques.
Les recommandations actuelles insistent ainsi pour ne pas confondre ces lésions avec des pathologies osseuses malignes et éviter des investigations invasives inutiles.
En résumé, les atteintes squelettiques dans la sclérose tubéreuse, bien que discrètes, font partie intégrante du tableau radiologique et peuvent servir de marqueurs d’imagerie supplémentaires pour améliorer le dépistage et la prise en charge précoce de cette maladie.